La Tombe Campanari

La tombe Campanari fut découverte à Vulci en 1833 par Vincenzo Campanari, dont elle tire son nom, et deux de ses fils, Secondiano et Carlo. Elle se situe dans la nécropole dell’Osteria et date du IIIe siècle av J.-C. Les fresques qui l’ornaient ont aujourd’hui entièrement disparu, détruites peu de temps après leur découverte. Secondiano Campanari rédige la description des peintures de la tombe peu de temps après sa découverte et publie deux gravures dans les Monumenti inediti pubblicati dall’Instituto di corrispondenza archeologica de 1834, planches LIII et LIV.

Monumenti inediti pubblicati dall’Instituto di corrispondenza archeologica, II, 1834, planche LIV
Monumenti inediti pubblicati dall’Instituto di corrispondenza archeologica, II, 1834, planche LIII

La tombe Campanari est située aux abords d’une des routes principales menant à Vulci. C’est une tombe hypogée, son apparence extérieure est similaire à d’autres tombes de ce type à Vulci. Elle est composée d’un long dromos, que certains auteurs considèrent comme une antichambre, puis d’une chambre quadrangulaire pourvue en son centre d’une grosse colonne.

Les peintures murales furent réduites en fragments lors de la tentative de détachement des fresques par les Campanari. C’est à partir de dessins et de descriptions qu’on peut restituer leur aspect. On sait qu’elles représentaient des figures féminines, masculines, d’enfants et de démons psychopompes. Les personnages portent des manteaux et des tuniques de couleurs différentes (rouge, blanc, bleu). On les distingue par leur peau brune pour les jeunes garçons et les hommes ou blanches pour les femmes. Ces peintures représentent les Enfers et l’au-delà. Sur la paroi d’entrée, on peut supposer qu’un démon accueille l’homme et l’enfant défunts. Sur les parois latérales, on retrouve plusieurs membres de la famille du défunt qui se dirigent vers la paroi du fond, sur laquelle est représenté le couple infernal : Hadès et Perséphone (Aita et Persipnai), assistés de l’assemblée des juges infernaux qui décident du sort de l’âme des morts. Il est possible que le couple infernal se réfère au couple aristocratique à qui appartenait la tombe.

Chapiteau provenant de la tombe Campanari, Antiquarium de la Villa Corsini, Florence. Auteur : Sailko.

Un chapiteau en nenfro (pierre volcanique) a été conservé et provient de la colonne soutenant le columen de la tombe Campanari de Vulci. Il mesure 47cm de haut et présente sur ses quatre faces deux bustes masculins, et deux bustes féminins adossés symétriquement et séparés par des crosses à volute qui supportent l’abaque. Le chapiteau est grandement endommagé en raison de la fragilité du nenfro, mais on peut encore distinguer les détails des bustes féminins qui sont tous deux identiques. Les bustes féminins sont vêtus d’une tunique attachée aux épaules par des fibules circulaires. Les visages, eux, sont identiques. Une des faces présente une femme au visage fermé, le haut de son crâne est lacunaire, il est difficile de juger de sa coiffure, mais l’on peut voir des tresses qui seraient hypothétiquement nouées sur la nuque, laissant voir des oreilles qui sont ornées de boucles d’oreilles. Les bustes masculins sont habillés de manière similaire, mais leur visage sont empreints de pathos ,avec des yeux et une bouche très expressives. Leur visage est encadré par d’épaisses mèches tombantes dans un style léonien typiquement hellénistique. Ce modèle de chapiteau à protomés est un exemple typique de l’architecture funéraire étrusque tardive et sera repris par les Romains à la période républicaine puis impériale, avec des bustes de divinités. Même si de nos jours la tombe Campanari a disparu, on peut retracer son parcours. Le chapiteau a d’abord été exposé dans la salle du musée archéologique de Florence par Luigi Adriano Milani (directeur du musée à la fin du XIXe siècle). De nos jours, le chapiteau se trouve dans les réserves du musée à la villa Corsini à Florence. Au musée étrusque de la Villa Giulia est conservé également un chapiteau en nenfro à protomés provenant d’une tombe contemporaine de Vulci.  

La Tombe Campanari reconstituée dans l’exposition au Pall Mall en 1837 (d’après un dessin conservé au British Museum). Auteurs : Laura Kalhauge, Ruben Da Silva, Cervane Vaternel-Neveu, Sarah Relaix, Julia Compagnon.

La tombe Campanari fut reconstituée dans une des salles lors de l’exposition étrusque organisée au Pall Mall en 1837. L’espace intérieur de la chambre nous est connu grâce à un dessin conservé au British Museum. Des fac-similés des peintures figuraient sur les parois, tandis que plusieurs objets figuraient autour de la colonne et de banquettes funéraires. Parmi ces objets se trouvait un magnifique trépied supportant un brûle-parfum. Il est aujourd’hui conservé au Musée grégorien étrusque du Vatican sous le numéro d’inventaire MV.12110. Il est en bronze et mesure 69 cm sur 45,5 cm. Ses pieds sont en forme de pattes de lion et sont reliés par des montants surmontés de groupes de figures représentant des satyres et des ménades, des fauves attaquant leurs proies et d’autres personnages de la mythologie grecque (Héraclès, Marsyas, Midas). En-dessous de ces scènes figure un riche décor ajouré d’entrelacs et de motifs végétaux. L’iconographie renvoie au sacrifice et au komos, le cortège dionysiaque. Le trépied peut être daté de la fin du VIe siècle ou du début du Ve siècle avant J.-C. La tombe Campanari est quant à elle datée du IIIe siècle avant J.-C. La différence de datation s’explique aisément : les Campanari ont exposé au Pall Mall des objets n’appartenant pas au mobilier originel de la tombe. Son critère principal était la beauté et la préciosité des objets : ils devaient mettre en valeur la richesse des peintures de la tombe et étonner les visiteurs par leur luxe – il s’agissait en effet d’une exposition-vente à but lucratif.

Bibliographie

Secondiano Campanari, “Pitture di una tomba vulcente, Ann Inst, X, 1838, p. 249-252 (= Mon Inst, II, 1834-1838, tav.LIII-LIV).

Giovanni Colonna, “Archeologia dell’età romantica in Etruria : i Campanari di Toscanella e la tomba dei Vipinana”, dansStudi Etruschi, XLVI, 1978, p. 81-117.

F.Messerschmidt – A.von Gerkan – K.Ronckzewski, Nekropolen von Vulci, Berlin 1930.

Judith Swaddling (ed.), The Impact of Early Etruscan Discoveries on European Culture, Londres, 2018.