Métaponte et l’Incoronata

Histoire des sites

Métaponte est une ancienne cité grecque de Lucanie, sur la côte orientale du golfe de Tarente. Elle a été fondée vers 700 av. J.-C. par des colons venus de Sybaris et de Crotone. La ville était l’un des grands pôles de la côte ionienne, c’était une voie de passage et d’échange. La cité a ensuite perdu son importance sous l’Empire romain. Comme toutes grandes villes, Métaponte présente plusieurs sites de production artisanale. Un premier, le plus ancien, qui se situe dans la chôra de la polis, au sud-ouest de la cité, sur une colline : l’Incoronata. En outre, le quartiers des potiers (kerameikos) a été découvert près de l’agora de la ville lors de fouilles archéologiques menées en 1972-1973 par la Surintendance de Basilicate. Cette découverte a d’ailleurs confirmé que Métaponte était l’un des premiers centres de production de vases à figures rouges en Grande Grèce, au milieu du Ve siècle av. J.-C. L’activité du Kerameikos semble avoir débuté vers le milieu du Ve siècle av. J.-C. et s’être poursuivie au moins jusqu’au début du IVe siècle av. J.-C.

Lécythe du Peintre du Primato, vers 375-325 av. J.-C., Paris, Musée du Louvre, ED 773 (élab. L. Ripault, N. Boukrif)

La colline de l’Incoronata surplombe le côté sud de la vallée du fleuve Basento vers la côte ionienne. Elle a été d’abord utilisée par les populations indigènes, les Oenôtres, qui la fréquentent au moins dès le IXe siècle av. J.-C., et a servi de zone artisanale dès le VIIIe siècle av. J-C. Vers le milieu du VIIIe siècle av. J.-C. des Grecs, peut-être liés à la colonie voisine de Siris, s’y installent et cohabitent avec les indigènes.
Le site est ensuite abandonné à la fin du VIIe siècle av. J.-C. de façon contemporaine à la fondation de Métaponte. La cité y installe un sanctuaire extra-urbain à la partir du début du VIe siècle av. J.-C.

 Archéologie des sites 

Le site de l’Incoronata est le plus riche de la production de vases lucaniens. Il a été longuement fouillé et étudié depuis les premières fouilles dans 1970, menées par la Surintendance de La Basilicate, puis par les universités de Milan (de 1974 à 1996) et d’Austin (de 1977 à 1978). Les dernières fouilles sont celles réalisées depuis 2002 par le Laboratoire Archéologie et Histoire Merlat (LAHM) de l’Université de Rennes 2 sous la direction de Mario Denti. Aujourd’hui le site de l’Incoronata est encore fouillé. Nous sommes à la XXème campagne de fouilles, toujours menée par le LAHM de Rennes 2.  

Ces différentes recherches ont mis en lumière les activités artisanales de céramistes présentes à Incoronata depuis le VIIIe siècle av. J.-C.

Dessins de fragments de vases découverts sur l’Incoronata (élab. L. Ripault, N. Boukrif)

Aussi, d’après les études réalisées par Clément Bellamy, l’Incoronata a un contexte mixte, c’est-à-dire qu’il y a une présence grecque et italique. Grâce aux vases retrouvées sur le site, nous savons que les deux cohabitaient, utilisaient les mêmes outils, réalisaient leurs vases en s’inspirant mutuellement. Cela a mené à une ‹ hybridation › de la production lucanienne.

Les différentes fouilles ont permis de révéler une organisation en trois zones, une carrière d’argile, une zone dédiée à la décantation et au travail de l’argile et, enfin, une zone de cuisson. Bien évidemment, les fouilles ont également révélé du matériel céramique. De nombreux vases grecs, de Corinthe, d’Athènes et de Grèce de l’Est, ont été mis au jour : de grands contenants indigènes, des vases en impasto (l’argile n’est pas épurée donc riche en inclusion) aussi bien indigènes que grecs, aussi un plus petit nombre de céramique indigènes monochrome ou bichrome. Les célèbres exemplaires de céramique grecque figurée et en relief de l’Incoronata ont été trouvés dans des contextes archéologiques avaient été longtemps interprétés dans le sens domestique, considérés comme partiellement creusés dans le terrain vierge et bâtis en brique crues sur un socle de pierre.

Bibliographie

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  • C. Bellamy, La céramique indigène peinte de l’Incoronata. Étude typo-fonctionnelle et anthropologie d’une production de l’âge du Fer en Italie méridionale, thèse de doctorat an archéologie, sous la direction de M. Denti et M. Osanna, Université de Rennes 2, 2017.
  • C. Bellamy, ‹ À propos d’une production céramique indigène dite matt‑painted dans le cadre de l’Italie méridionale protohistorique. Le cas de l’Incoronata ›, Frontière·s : revue d’archéologie, histoire et histoire de l’art, 4, mis en ligne le 15/06/2021, consulté le 04/02/2024 (URL : https://publications-prairial.fr/frontiere-s/index.php?id=667).
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