Tarente, fondée vers 706 av. J.-C. par Phalantos, est la seule colonie spartiate et la seule colonie d’Apulie. Sa fondation est également liée àTaras, fils de Poséidon, considéré comme le fondateur mythique de la cité. La légende raconte que Taras, pour honorer son père, effectuait des sacrifices dans la région de Tarente. Lors d’un de ces sacrifices, il aurait mystérieusement disparu dans une rivière. Plus tard, des colons grecs auraient fondé la ville de Tarente en son honneur, la nommant ainsi en hommage à Taras.

Dès sa fondation, Tarente profite d’une position géographique stratégique sur le golfe de Tarente, lui permettant de développer un commerce florissant avec les cités grecques, étrusques et illyriennes. Son port devient un carrefour maritime majeur de la Méditerranée. Tarente se distingue également par sa production artistique dynamique, influencée par les traditions spartiates et ouverte aux apports des autres cités grecques. Cependant, son développement fut freiné par les luttes incessantes contre les populations hostiles d’Apulie, comme les Iapyges, qui infligèrent une lourde défaite aux Tarentins vers 474 av. J.-C.

Tarente, établie sur la côte adriatique, a été un centre majeur de production de vases figurés dès l’époque archaïque en Apulie. Les fouilles archéologiques, initiées depuis les années 1950, ont mis en lumière les ateliers de potiers à différents endroits de la ville. Ces découvertes comprennent une concentration d’ateliers de potiers et de coroplastes dans la ville et ses environs. Cependant, les conditions des fouilles archéologiques posent des défis. Les différents fours sont souvent découverts lors de fouilles dans la ville moderne, érigée sur les vestiges antiques, engendrant une rareté, voire une absence, d’informations sur la production. Malgré cela, les fouilles récentes dans la cité moderne ont révélé principalement deux zones d’ateliers de potiers, situées à côté du secteur des nécropoles dans le secteur oriental.

Un exemple significatif est celui d’un four rectangulaire découvert en 1981 à l’actuelle Via Cavour, à l’angle de la Via Anfiteatro, bien que sa datation demeure inconnue. La première zone, englobant des découvertes d’installations artisanales sur la Via Pupino, la Via Giusti, la Via Battisti, la Via Fratelli Mellone et la Via Aristosseno, s’étend de l’époque archaïque jusqu’au IIe siècle av. J.-C. Quant à la seconde zone, comprenant la Piazza Marconi, la Via Gorizia, la Via Monfalcone, la Via Minniti et la Via Leonidas, elle abrite des installations artisanales datant de la période archaïque jusqu’au IIe-Ie siècle av. J.-C.

Un exemple concret de la présence d’ateliers à Tarente est la structure découverte à la Via Leonida. Utilisé du IVe au IIIe siècle av. J.-C., cet atelier présente un four partiellement endommagé adjacent à une salle. La découverte d’un puits fournissant des vases de style de Gnathia suggère un abandon vers la moitié du IIIe siècle av. J.-C. On note également la présence, dans les drains de l’atelier, de vases à vernis noire ainsi que des vases à figures rouges datant des V-IVe siècles av. J.-C.

L’étude de la dégradation de l’enduit des productions des vases à vernis noir, trouvés directement à Tarente, peut nous permettre de déterminer leur origine. Une analyse montre que l’argile de Tarente, de par sa composition, ne peut durablement recevoir un enduit. Ainsi, un vase présentant une bonne résistance de l’enduit à vernis noir ne peut être associé à la fabrication des ateliers de Tarente. Cela suggère la possibilité d’importation de productions céramiques, notamment en provenance de régions voisines telles que Métaponte.

La première moitié du IVe siècle av. J.-C. marque une période de paix et de prospérité pour Tarente, avec un développement économique et social notable. Pour cette période, les recherches ont identifié plus de 60 peintres ou groupes tarentins. La concurrence avec la production attique diminue considérablement, en raison de la diminution des importations permettant à Tarente de produire exclusivement pour la population locale, grecque et italique. Les artisans se spécialisent dans des formes telles que le cratère en cloche et à colonnettes. Ils créent des vases destinés aux sites indigènes ainsi qu’aux nécropoles urbaines, utilisant même des vases monumentaux dans les rituels funéraires des princes dans le nord des Pouilles, au cours de la seconde moitié du IVe siècle av J-C. Le Peintre de Felton, par exemple, produit abondamment des pélikés et lécythes qui sont utilisés principalement dans la nécropole de Tarente, suggérant la présence d’un atelier sur plusieurs générations au sein même de la ville.

Le style tarentin, émergeant au IVe siècle, influence d’autres ateliers régionaux grâce à la diffusion de ses motifs décoratifs. La transmission du style tarentin se produit de différentes manières, notamment par une migration d’artisans vers d’autres régions telles que Arpi, Ruvo mais aussi de par l’importation de vases décorés dans le style tarentin ou bien de part l’hypothèse d’une formation à Tarente. Ainsi, cette interaction entre artisans et la circulation des œuvres contribuent à la dissémination et à l’adoption du style tarentin dans d’autres contextes artistiques.

En 281 av. J.-C., sous le commandement de Lucius Aemilius Barbula, les légions romaines pénètrent à Tarente, entraînant le pillage de la ville. Malgré les renforts samnites et salentins, Tarente subit une défaite face aux Romains.

Carte d’Italie du Sud

Bibliographie

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